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Trouver le bon équilibre pour planifier les espaces-rues
Plus de place à la mobilité durable dans nos villes ? C’est souhaitable et c’est faisable, mais il faut pouvoir opérer des choix qui jouent sur les infrastructures et les espaces. Pour LSC Engineering Group, il faut planifier et penser large, en trouvant le juste équilibre entre les besoins spécifiques des différents usagers.
Au cours des dernières années, nous avons remarqué un changement dans l’approche générale de la planification de la mobilité. De plus en plus, les principaux acteurs concernés essaient de développer des projets en promouvant la mobilité durable. Pour ce faire, il faut essayer de trouver un bon équilibre entre les besoins spécifiques des différents utilisateurs des espaces rues.
Le trottoir est principalement dédié aux piétons pour lesquels il est indispensable de créer un réseau séparé et continu avec un maillage performant et des chemins courts. Il faut prévoir des chemins suffisamment larges, non seulement pour augmenter le confort et la sécurité mais aussi l’acceptance. L’aménagement des trottoirs doit tenir compte des besoins spécifiques : personnes à mobilité réduite, famille avec poussette…
La circulation des cyclistes est également à considérer et peut se faire soit sur le trottoir soit sur la voirie, en mixte ou en séparée. La séparation des flux ainsi que la circulation sur le trottoir augmentent la sécurité face aux charges de trafic trop importantes mais cela engendre naturellement un espace rue plus large. Comme pour les piétons, il est primordial de créer un réseau continu et sécurisé, surtout au niveau des intersections où la majorité des accidents se produit.
Chacun sa voie
À côté des piétons et cyclistes, le trottoir accueille aussi beaucoup d’installations techniques, comme les mâts d’éclairage, les feux de circulation, les signalisations verticales ou les armoires électriques. Si l’espace, visible et souterrain, est mal planifié, ces équipements réduisent fortement la largeur du trottoir réellement disponible.
Pour une planification plus durable, il faut améliorer la qualité de séjour et éviter les îlots de chaleur ; la présence d’espaces verts dans les espaces rues est aussi importante. Inutile de préciser que ces éléments ont aussi besoin de suffisamment de place.
Pour rendre les transports en commun compétitifs par rapport aux voitures, il ne suffit pas seulement de rendre les trajets gratuits, il faut surtout que le temps du voyage soit inférieur à celui en voiture. Pour garantir ceci, il faudrait créer des voies séparées dédiées aux transports en commun afin qu’ils ne soient bloqués dans les mêmes bouchons que les voitures.
La largeur de la voirie est souvent dépendante de sa hiérarchie et de sa charge de trafic. Autrement que les infrastructures pour la mobilité active et les transports en commun, l’infrastructure des voiries est bien développée et ne nécessite généralement pas plus d’espace que ce qui est déjà à disposition. Cependant, en termes de stationnement, la demande est souvent de prévoir des places plus larges pour accueillir des véhicules de plus en plus volumineux : c’est clairement un développement dans la mauvaise direction !
Des choix, entre besoins et courage
Dans le cadre d’un PAP (plan d’aménagement particulier, pour la création de nouveaux espaces, quartiers, grandes infrastructures urbaines), il est relativement facile d’inclure toutes les exigences précitées. Cet exercice s’avère plus complexe dans les quartiers existants qui ont été planifiés dans des époques où le besoin en mobilité était très différent.
Avec les largeurs disponibles des espaces rues existants, il est impossible de prévoir toutes les largeurs nécessaires pour les modes durables, tout en conservant les espaces nécessaires pour la circulation des voitures qui existent aujourd’hui.
Dans les quartiers existants, un choix est donc à prendre, souvent et malheureusement au détriment de l’espace réservé aux modes durables ou en réduisant la largeur de leurs infrastructures. En réduisant les largeurs recommandées, les espaces de sécurité disparaissent et le risque d’accident augmente. En cas d’accident, les piétons et les cyclistes sont les plus vulnérables. Puisque la voiture a toujours une importance élevée dans notre société, nous ratons des opportunités de créer les connexions et les infrastructures nécessaires pour la mobilité durable. Ses réseaux restent incomplets, voire dangereux.
Au lieu de réduire l’espace des modes durables, il serait donc souvent plus opportun de supprimer les places de stationnement, ou mêmes certaines voies de circulation dans les villes où la présence de la voiture n’est plus essentielle.
Trop souvent, nous cherchons encore à trouver des solutions intermédiaires ou nous prenons les mauvais choix pour ne pas « offenser » les automobilistes. Tous les acteurs de la mobilité et de la planification de voiries (État, communes, entreprises et citoyens) devraient se poser la question de savoir s’il s’agit seulement d’un problème d’espace ou aussi d’un problème de courage.
Michel Heckel, Directeur de projet – Trafic et Mobilité, Luxplan
Photos et illustration : LSC Engineering Group
Article paru dans